Abyss
Il y a un mois, France 3 diffusait le film Abyss, science fiction parlant d’une nouvelle forme de vie dans les profondeurs abyssales. Mais loin d’être une nouveauté, les organismes bioluminescents apparaissant dans le film, s’inspirent de réels monstres marins vivant à des milliers de kilomètres de profondeur. De plus, la lutte contre la pression est incarnée ici par un liquide ou fluide respiratoire qui permettrait à l’homme de descendre en grande profondeur. Liquide qui s’avère s’inspirer des expériences menées par le Dr Kylstra. Rencontre avec un expert de la plongée et de la pression, M. Gardette, Directeur scientifique de la COMEX.
Bien avant Le jugement dernier et Titanic, James Cameron réalisa en 1989 le film intitulé Abyss : après avoir percuté un objet non-identifié, un sous-marin nucléaire sombre dans les profondeurs de la mer. Afin d’explorer l’épave, une équipe de foreurs pétroliers et de militaires est envoyée. Au fur et à mesure que les recherches avancent, ils vont se retrouver face à une étrange masse transparente et lumineuse qui constitue le prélude d’une grande découverte. Il s’agit de créatures vivantes dotées d’une forte intelligence et qui ont développé non seulement leur propre civilisation au fond des océans mais aussi une maîtrise totale de l’eau.
VRAI : Certains animaux produisent de la lumière
Les Abysses se situent dans la zone sombre des océans. Imaginez, nous sommes à plus de 1000 mètres de profondeur et les animaux vivent dans une nuit interminable. Cependant, vous pouvez apercevoir de temps en temps certaines lumières qui brillent au loin ! Conscience ? Est-ce que j’suis morte ? Non pas du tout ! Cette lumière est produite par les animaux eux-mêmes ! Elle provient d’une réaction chimique entre la luciférine et la luciférase, enzyme accélérant la réaction. Le mélange de ces deux molécules (qui se fait selon la volonté de l’animal) se réalise dans les photocytes, cellules productrices d’électricité. Il peut y avoir certains cas où les animaux hébergent des bactéries qui elles seules peuvent produire la lumière. On parle de symbiose.
VRAI : Il existe un fluide respiratoire mais FAUX Les perturbations dues aux hautes pressions ne peuvent pas être résolues par ce fluide
Interview
M. Gardette, Directeur Scientifique de la COMEX
compagnie maritime expérimentale, basée à Marseille
« De nos jours, les records enregistrés chez l’homme muni de bouteilles de mélange de gaz (hélium, hydrogène, azote, ainsi qu’oxygène en moindre quantité…) sont de 534 mètres de profondeur en mer (1988) et de 700 mètres en caisson (1992). »
Pouvez-vous nous parler de ce fluide respiratoire ? Existe-t-il vraiment ?
Le film date de 1989. Il s’inspire d’une expérience du Dr Kylstra, menée vers 1970 au sein de la Duke University en Caroline du Nord. Avec ce liquide (le perfluorocarbone), un essai avait été fait sur l’homme mais il était alors anesthésié et refroidit, autant dire que la consommation d’O2 par le sujet été minimale. Mais à l’état actif, notre cerveau et nos muscles consomment beaucoup d’O2, c’est pourquoi l’homme en activité va très vite se fatiguer avec seulement un fluide respiratoire. De plus, lors de la reprise de la respiration, deux problèmes apparaissent pouvant entraîner une septicémie :
- le risque d’une infection (les protéines des poumons ont été rincé par le liquide et donc ont été dénaturé, ce qui les rend inactives) ;
- et le risque des déchirures alvéolaires.
On voit donc les limites de cette utilisation. Par contre les plongeurs d'aujourd'hui utilisent des bouteilles de mélanges de gaz. La COMEX a pu mener des expériences prouvant que les singes pouvaient descendre jusqu’à 1200 mètres avec ce mélange de gaz, et les souris jusqu’à 2000 mètres, là où la pression s’élève à 200 bars.
Et pour l’humain ?
Pour l’humain, on ne sait toujours pas la profondeur maximale à laquelle il pourrait se permettre de descendre. Le liquide présente trop de danger et trop d’inconfort (impossible de faire un effort physique) pour continuer les recherches. De nos jours, les records enregistrés chez l’homme ayant des bouteilles de gaz (hélium, hydrogène, azote, oxygène en moindre quantité…) sont de 534 mètres de profondeur en mer (1988) et de 700 mètres en caisson (1992).
Mais il serait inutile de faire des recherches sur la limite que l’on peut atteindre si on ne peut pas travailler convenablement. Le but de ces recherches étant de permettre aux hommes de travailler.
Quel genre de travail réalise ce genre de plongeur ?
Certains plongeurs travaillent sur des connexions, des réparations liés au pétrole sous-marin : c’est le pétrole off-shore. C’est la raison pour laquelle les recherches de la COMEX sont cofinancées par des compagnies pétrolières. En effet, bien que l’homme soit de plus en plus remplacé par les machines, il existe encore des plongeurs qui exercent ce travail jusqu’à 200 mètres de profondeur. Pour remonter, un plongeur met le double du temps mis pour descendre (donc un plongeur qui doit descendre de 60 mètres mettra une journée tandis que celui qui doit remonter de 60 mètres mettra deux jours). Donc, au-delà des 200 mètres, on utilise généralement des machines pour faire le travail.
Pour terminer, le film nous montre Ed Harris descendre tel un héros jusqu’à 9000 mètres dans les profondeurs abyssales…Est-ce qu’un jour ce sera possible ?
Sachez que l’homme ne pourrait pas dépasser les 4000 mètres : les protéines et cellules en seraient complètement dénaturées…Il s’agit d’une limite absolue. Ce film fait référence aux études menées sur le liquide respiratoire, mais ce n’est pas la réelle solution au vu de tous les problèmes qu’il déclenche. La seule indication que l’on a c’est l’étude du cachalot. Il peut plonger à de très grandes profondeurs seulement en apnée ! Et vous savez jusqu’à quelle profondeur il peut descendre ?...
... 2000 mètres !!!!